Premier mai aigre, gris et froid.
C'est une date qui n'a pas énormément grandi en vieillissant. Car elle est une vieille date. Voilà juste trente ans que le quatrième congrès annuel des syndicats ouvriers fédérés américains, réuni à Chicago, décidait de conquérir, à partir du 1er mai 1886, la journée de huit heures.
Cette journée du 1er mai 1886 fut aux Etats Unis, l'occasion de violences révolutionnaires que le gouvernement réprima et fort durement. Mais cette date n'était alors qu'américaine. Il appartenait à nos spécialistes d'internationaliser la manifestation du 1er mai. L'idée en fut lancée deux ans plus tard au congrès de Bordeaux et très chaleureusement applaudie dans les syndicats ouvriers. C'est le 1er mai 1890 qu'ils eurent la joie de la réaliser non sans tapage. cet anniversaire n'était malheureusement pas destinée à n'être que bruyant. Il fut sanglant dès l'année suivante et le 1er mai fut désormais - ci pendant assez longtemps- la journée que, d'une année à l'autre, certains patrons voyaient avec inquiétudes s'approcher , et que les syndicats guettaient avec un méchant plaisir. Il y a vingt-quatre ans de cela. Et les syndicats continuent de conseiller le chômage au 1er mai. Mais combien ces chômages diffèrent de ceux d'autrefois! Qu'ils sont anodins! Le gouvernement ne les redoute plus.
L'Etat donne congé à ses ouvriers qui en font déjà si peu!
Ce matin, une démonstration anodine a été faite. 19 convaincus sont sortis en cortège de la Bourse du Travail, sont passés devant l'Hôtel de ville et se sont rendus au cimetière où M. Damoutte a prononcé le discours habituel sur la tombe de Langrand. Il s'est félicité sur la victoire de M. Ringuier, a rappelé la fusillade de Fourmies- ce qui est de style- et a envoyé un souvenir ému à M. Nordet.
Puis la manifestation s'est dispersée.
L'après-midi, le délégué Galinaud, de la C.G.T. a fait une conférence entremêlées de chants et de projections cinématographiques.
Tous les tissages ont chômé et quatre ou cinq ateliers de construction.
Signalons enfin l'apparition d'une affiche de la C.G.T. qui est le comble de l'art d'écrire pour ne rien dire.
Journal de Saint-Quentin, mai 1914.
B.M. Fonds local.
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